de l'incidence éditeur propose des ouvrages consacrés aux arts contemporains (cinéma, danse, arts plastiques...), à la philosophie, et à la littérature.
Les textes novateurs sont privilégiés, selon une attention particulière accordée aux réflexions sur les expériences esthétiques et politiques.
Des utopies classiques et modernes à des tentatives cinématographiques, en passant par la danse et quelques figures des XXe et XXIe siècles, de l'incidence éditeur mise sur la multiplicité des disciplines afin de favoriser leurs rencontres (pas toujours calculées).
de l'incidence éditeur -
Cherbourg-en-Cotentin (50)
est une maison d'édition indépendante
dirigée par Sabrina Bonamy & Robert Bonamy
S U R L E G E S T E
e x t r a i t s
Repas en plein air
Robert Bonamy
à propos de Nocturne pour le Roi de Rome
(Jean-Charles Fitoussi)
Un serveur aux cheveux grisonnants peut être remarqué dans sa lutte avec le vent : il essaie à plusieurs reprises d'allumer des bougies avec difficulté, tandis que le bas de sa veste de costume blanc ne cesse de se plier à ses allées et venues. Les serveurs et les invités participent à la scène par leur marche accompagnée d'une ligne mélodique différente, selon leur hiérarchie. Le propos de Fitoussi devient parfois explicite lorsque le chant d'une troupe nazie s'associe aux maîtres d'hôtel et à certains invités, hommes de pouvoir en costumes noirs, dans une séquence où des fragments sonores et visuels
de Rome, ville ouverte de Rossellini (la musique de début ou la chute de Pina) sont insérés, associés à l'attitude d'un personnage ou à un visage de femme.
Une composition complexe jouant sur les constrastes musicaux qui s'associent aux différentes classes présentes dirige la scène. Cette construction répond aux trajets des personnages. Les mouvements d'étoffe créent un supplément dans cette scène, ajoutant des mouvements déplacés à la chorégraphie d'ensemble.
Les tissus libèrent des corps pour dessiner leurs propres volutes en leurs marges dans Nocturnes pour le roi de Rome : il s'agit, pour les figurants, de sans cesse rattraper leurs échappées. Le motif pictural de la Ninfa articule, selon Didi-Huberman, la "cause extérieure" (le vent, l'atmosphère) et l'intériorité qui préside à la danse des corps : les tissus se déploient librement en même temps que les drapés modèlent le corps à son contact. Les étoffes jouent ici en solitaire, à l'écart des corps fantomatiques qui ne réagissent que par un souci de bonne tenue.
Dans Le Mirage, le battement d'un col, en marge des propos de table, est lui aussi le rappel d'un enjeu stylistique des gestes d'air, liés à la recherche d'un geste pictural. Revenir au film Lumière Le Repas permet ainsi de mettre l'accent sur le déploiement de ces petits mouvements de fond, sur leur remontée jusqu'à un accessoire ou un vêtement. La présence de ce plan est suggérée en filigrane de nombreuses scènes de repas en plein air, qui autorisent de tels déplacements que le cinéma sait saisir.